« Mais si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde. » Antoine de Saint-Exupéry.

Je ne pense pas avoir un caractère trop difficile à vivre. Certes, je suis assez têtu, mais quand on sait comment s’y prendre avec moi … On peut facilement me faire céder au final. Je m’efforce d’être optimiste. Je n’ai pas eu une vie très compliquée. J’ai eu beaucoup de chance, il faut le dire, alors c’est sans doute plus facile pour moi de voir le bon côté des choses. Il n’est pas rare de me voir souriant. Comme tout le monde j’ai des moments où je vais moins bien. Je ne le cache pas forcément, mais je préfère rester seul dans ces moments. Je vais souvent me réfugier à la patinoire ou à la bibliothèque. J’aime lire et patiner, ce sont mes deux échappatoires. Les deux choses qui me font totalement oublier ce qui m’entoure et cela fait un bien fou. Je n’ai jamais été de nature stressée alors les compétitions ne m’effraient pas. Certes, il y a toujours cette petite appréhension quand une compétition approche ou les quelques minutes avant d’aller sur la glace, mais rien de bien méchant. Cela me pousse plus à faire de mon mieux, qu’autre chose. Par contre, je suis assez dur envers moi-même. Je peux rester des heures à la patinoire si j’estime que je ne me suis pas assez entraîné ou si je ne réussis pas un enchainement, une figure. Il m'arrive de me rabaisser plus bas que terre quand je juge que ce que je fais est mauvais.


Mes parents m’ont donné beaucoup de choses et je ne veux pas les décevoir. Je supporte mal les échecs et ne pas réussir à faire quelque chose m’agace fortement. Je suis très appliqué. Enfin, quand quelque chose me tient à cœur, car sinon je peux rapidement devenir nonchalant. Un trait de caractère qui me suit depuis que je suis petit. Je suis également très compétitif, mais pas non plus mauvais joueur. Je mets juste toutes les chances de mon côté et je m’entraine dur. C’est sans doute pour cela qu’échouer me blesse autant, je mets beaucoup de mon énergie dans ce que je fais. Je suis reconnaissant de pouvoir vivre mon rêve et je ferais en sorte que cela dur le plus longtemps possible. Le patinage c’est une grande partie de ma vie, je patine depuis mes six ans, même si bien sûr avant c’était juste pour m’amuser. Enfin, ça l’est toujours, mais ce n’est plus uniquement cela.


Je n’ai jamais été mauvais à l’école, c’est même plutôt le contraire, je suis assez vif d’esprit, et pourtant je n’ai jamais réellement aimé cela … Rester assis sur une chaise à écouter un professeur déblatérer le cours, très peu pour moi. Je n'ai pas eu de mal à laisser mes études de côté à la fin du lycée. Suivre des cours par correspondance me gêne moins, puis la littérature est un de mes sujets de prédilections. Il est rare que je n’aie pas un livre dans mon sac et chez moi vous ne pourrez pas louper la grande bibliothèque qui trône dans ma chambre.


Plutôt fêtard, je ne suis jamais contre sortir. Je n’étais pas comme cela avant, mais quand j’ai eu cette période de confusion à cause de l’annonce de mon adoption, je me suis laissé entrainer par des amis. Je suis plutôt joueur également. Voire même dragueur et je ne le crie pas sur tous les toits j’ai eu pas mal de conquêtes. Côté cœur, je suis plutôt réticent à m’engager. Sans doute par peur d’être abandonné. Encore … Même si c’est différent. Je n’ai pas eu beaucoup d’histoire sérieuse et c’est toujours moi qui finissais par rompre avant de trop m’attacher. Côté amitié, je suis très sociable. Bavard, mais je parle peu de moi. J’aime faire rire mon monde et je suis plutôt extraverti. Cependant, je ne déteste pas la solitude par moment … En général, c’est quand quelque chose me tracasse, mais pas seulement. Être tranquille avec un bon livre ça a du bon également.


Je n’ai jamais vraiment mal pris le fait d'être un enfant adopté. J’ai juste mis du temps à encaisser la nouvelle. J’ai traversé une période pas très joyeuse où je préférais sortir que rester à la maison, je mettais de la distance entre ma famille et moi. J’avais simplement besoin de me retrouver. C’est plutôt brutal de se voir annoncer que l’on n’appartient pas réellement à ce monde où on pensait avoir sa place. Je n’en ai pas non plus voulu à mes parents adoptifs. Que pouvais-je leur reprocher ? Ils ont toujours été aux petits soins pour moi, ils n’ont jamais douté de mes capacités et ils m’ont toujours soutenu. Je parle peu du fait que je suis adopté. Pour moi mes parents adoptifs sont mes parents et mon frère, il est hors de question que je dise qu’il est mon demi-frère. Je n’aime pas que l’on me pose des questions à ce sujet non plus. Je ne veux pas de la pitié des autres. Certes, ce n’est pas toujours facile quand j’y pense et que certaines questions me traversent l’esprit … Mais j’ai une famille qui m’aime et je suis heureux c’est tout ce qui compte, que je sois leur fils biologique ou non. Du moins, c’est ce que je me répète quand mes interrogations me plombent trop le moral. Je suis très souvent souriant, mais dans le fond je suis sensible. Il est très facile de me faire rire, comme il est très facile de me faire pleurer. J’ai appris à le dissimuler au fil des années. Je m’en sors plutôt bien. Quand je vais mal, je suis subitement moins bavard et je vais me réfugier à la patinoire ou dans un coin avec un bon livre.


J’adore mes proches et mes amis. Pourtant … Je ne suis pas toujours très délicat, j’ai plus de tact avec mes chiens qu’avec les personnes qui m’entoure. Je suis très impulsif et franc. Parfois je blesse les autres sans m’en rendre compte, sur le coup. Je peux prêter une oreille attentive à quelqu’un qui voudra se confier, mais donner des conseils et consoler … Je suis assez maladroit. Par contre, je suis observateur et quand je connais bien une personne, je devine assez facilement quand quelque chose ne tourne pas rond. Je vis seul depuis un an et pourtant, parfois le foyer familial me manque toujours autant. J’y retourne assez régulièrement comme mes parents vivent à Incheon aussi. Contrairement à mon frère qui est parti étudier à Séoul.


Rancunier, ne me cherchez pas trop. J’ai l’air calme comme ça, mais je m’emporte vite surtout si on s’amuse à appuyer là où ça fait mal. Je suis tolérant, mais j’ai des limites. J’ai un corps frêle, mais détrompez-vous, je sais me battre et je ne suis pas si faible. Le sport que je pratique rend juste ma musculature très fine. Très énergique également, le patinage m’aide à me canaliser. La prudence n’est pas ma première préoccupation et me le reproche souvent. Curieux et perspicace. J’ai déjà patiné en couple et participer à deux ou trois compétitions dans ce domaine. Ma partenaire est aussi ma meilleure amie. Nous patinons de temps en temps ensemble pour l’amusement.


Je suis très fier du chemin que j’ai parcouru en peu de temps. Partir au Canada quelques années m’a rendu plus autonome mais pas forcément plus prudent. Je suis très gourmand … Trop peut-être mais je m’en moque. Et j’ai une addiction un peu bizarre … Le starbuck. Il y en a un juste à côté de la patinoire. J’y passe toujours en allant à la patinoire et en partant. J’adore lire. Je suis surtout fan de Stephen King, mais je lis vraiment de tout. D’ailleurs, j’ai lu Le Petit Prince, un bon nombre de fois et je peux en citer des passages. J’ai une très bonne mémoire, c’est toujours utile. Je change souvent de couleur de cheveux, mais celle que je préfère c’est le blond cendré, j’y reviens souvent. J’ai les cheveux longs depuis mes dix-sept ans environ. Oui, parfois j’étais sujet à des moqueries, mais bon … Je me moque du regard des autres. Je suis assez confiant et j’ai tendance à étaler cette confiance. Ne le prenez pas comme un signe de supériorité, ce n'est pas du tout le cas, c’est juste que … Je cache ma sensibilité derrière cela. Je me dis que si j’ai l’air confiant on me fichera la paix.


Je suis très organisé et ordonné, parfois on me dit que ça fait peur, tellement je note tout pour ne rien oublier. C’est une manie, je n’y peux pas grand-chose. J’ai pas mal d’ambition. C’est un peu de pression d’être considéré comme l’espoir coréen en termes de patinage, mais je fais avec. Mon rêve ? Pouvoir représenter mon pays lors des J.O et pourquoi pas le mener à la victoire, qui sait ?

« Faites que le rêve dévore votre vie afin que la vie ne dévore pas votre rêve. » Antoine de Saint-Exupéry.



Incheon -  1er janvier 1993. C’est la date à laquelle je suis arrivé à Incheon. En réalité, je suis né à Séoul le 15 décembre 1992. Cependant, ces deux dates sont très importantes pour moi, ainsi que pour ma famille d’accueil. Je suis un enfant adopté. Je suis né à Séoul mais je n’ai pas de souvenir de cette ville, qui daterait de mon enfance. J’ai grandis à Incheon avec mon frère aîné, Seung Cheol (de 3 ans plus âgé que moi) et mes parents. Je les considère comme ma véritable famille, puisque j’ignore d’où je viens réellement. Je dis souvent que cela ne m’a pas affecté et que j’ai toujours été épanouie dans la famille qui m’a offert un toit, que je déteste appeler ma famille d’accueil d’ailleurs, mais en réalité c’est un peu plus compliqué que cela. Je m’attarderais sur ce point un peu plus tard …

J’ai donc grandis à Incheon et franchement je n’ai jamais eu à me plaindre. Mes parents ont toujours été aux petits soins pour mon frère et moi. Je me suis souvent demandé ce qu’aurait été ma vie si je n’avais pas été adopté ou si j’avais été dans une autre famille, mais je finissais toujours par me dire que dans le fond, je n’aurais pas voulu être ailleurs. Je n’ai jamais manqué de rien, je me suis chamaillé avec mon frère aîné, j’ai fait de belles bêtises … J’ai grandi comme un enfant normal en fin de compte. Je ne savais pas encore que ma naissance cachait une histoire plus compliquée, alors pour moi tout était parfait.



Je suis né en plein mois de décembre. C’est sans doute pour cela que j’ai toujours aimé la neige et l’hiver. Maintenant que vous savez cela, vous ne serez sans doute pas étonné de savoir que je suis passionné de patinage artistique. Si bien sûr, vous le serez. La plus part des personnes qui ne me connaissent pas sont surpris. Pourtant c’est vrai … J’allais très souvent à la patinoire avec mes parents et mon frère. C’était comme une tradition dans la famille pour se retrouver tous ensemble. Petit à petit, j’ai commencé à beaucoup aimer cette activité. Très jeune, j’ai commencé à suivre des cours. Pour moi ce n’était qu’une activité extra-scolaire, même si j’aimais beaucoup cela. En grandissant, mon intérêt pour ce sport ne s’est jamais atténué, bien au contraire. J’ai continué de prendre des cours et de m’entrainer. Vers mes treize ans, mon coach m’a proposé de participer pour la première fois aux championnats de Corée du Sud. Je me suis bien classé et je crois que c’est à partir de ce moment que tout à commencer à changer. Ce n’était plus vraiment un loisir, c’était bien plus que cela et je mettais beaucoup d’énergie dans ce que je faisais.



C’est à la veille de mes quatorze ans, que mes parents ont décidé de me dire la vérité. J’ai été adopté. Mes parents ne l’étaient pas vraiment et mon frère, non plus. J’ai eu du mal à encaisser la nouvelle. C’est comme si toute ma vie, que je voyais si parfaite volait en éclat. Je me suis beaucoup renfermé sur moi-même après cette annonce. Je ne leur en voulais pas, j’ai toujours été très proche de mes parents. J’étais juste un peu perdu … Je me demandais sans arrêt pourquoi mes parents biologiques m’avaient abandonné ? Qu’est-ce que serait ma vie si j’avais grandis avec eux ? Ou même dans une autre famille d’accueil ? Je pense que c’est normal de se poser des questions dans ce genre de situation. Durant cette période assez difficile, je me suis réfugié dans le patinage, m’entrainant encore plus dur pour essayer de penser à autre chose. C’était comme si je n’étais à ma place nulle part. J’ai commencé à passer de moins en moins de temps chez moi. J’avais constamment besoin de me changer les idées, alors je sortais. J’allais à la patinoire ou je trainais avec des amis. Je me réfugiais souvent à la bibliothèque aussi. Je m’en voulais de mettre cette distance entre ma famille et moi, mais j’avais juste besoin de temps.



Durant cette période j’ai mis tout mon cœur dans ma passion, cela m’aidait à me sentir mieux et à ma place. J’ai participé à beaucoup de compétitions et j’ai souvent été bien classé. Pour ne vous citer que les résultats dont je suis le plus fier, je suis arrivé deux fois premier de ma discipline, aux championnats de Corée du Sud, à mes quatorze et quinze ans. Quand j’ai eu seize ans, ma coach m’a proposé de partir suivre un entrainement intensif de plusieurs mois au Canada. Je n’étais pas majeur mis mes parents m’ont autorisé à partir seul. La même année j’ai réussi à me hisser à la première place des championnats du monde junior.

J’ai participé à beaucoup de compétition, de plus en plus importantes et un peu partout dans le monde. Bien entendu je n’arrivais pas toujours premiers, mais j’étais souvent bien classé. C’est le patinage et toutes les opportunités que j’ai eu de ce côté-là qui m’ont aidé à me construire. Il m’arrive toujours de me poser certaines questions vis-à-vis de mon adoption, mais je veux relativiser … J’ai une vie que beaucoup envieraient, je n’ai pas à me plaindre. Cependant, je n’aime pas spécialement en parler. C’est souvent une surprise quand je parle de mon adoption à quelqu’un car je ne laisse jamais sous-entendre. Mes parents sont mes parents, jamais je ne préciserais qu’ils ne sont que mes parents adoptifs, pareil pour mon frère.



Mon rêve ne s’est pas arrêté là puisqu’à mes 19 ans, j’ai remporté le championnat de patinage artistique dans la catégorie : patinage individuel homme. Il m’est arrivé de patiner en couple mais uniquement pour le plaisir et je n’ai jamais fait de compétition dans cette catégorie. Aujourd’hui, on me considère comme l’espoir coréen en termes de patinage. Ce n’est pas toujours très facile à porter, ça met beaucoup de pression. Surtout que je m’entraine pour un jour avoir la chance de participer aux Jeux Olympiques. Si j’échoue je le prendrais mal vis-à-vis de moi-même, mais j’ai peur aussi de décevoir beaucoup de personnes … En particulier mes proches, c’est surtout leur avis qui m’importe. Je participe à d’autres compétitions à côté. J’aime le challenge et toujours tester mes capacités. J’ai beau être doué dans mon domaine je considère que jamais rien n’est acquis et que je dois sans arrêt continuer de travailler pour m’améliorer.

Depuis un an, je vis dans appartement seul, avec mes deux chiens Foxtrot et Jive. Je trouvais ces noms rigolos et j'aime bien la danse même si je ne la pratique pas. Le patinage rythme en grande partie mon quotidien, je dois m’entrainer, participer à certaines compétitions parfois en dehors de la Corée, mais je n’ai pas abandonné mes études pour autant. Je suis déscolarisé depuis mes dix-huit ans, mais je continue depuis ce temps de prendre des cours par correspondance. Je suis actuellement des études de littérature. Après tout, pour le moment j’ai la chance de pouvoir vivre ma passion, mais je sais que tout peut se terminer très vite et j’ai suivis les conseils de mes parents. Il me fallait quelques choses sur lequel rebondir au cas où. Même si je n’ai pas envie de penser à la fin de mon rêve éveillé pour le moment.

Je sais que j’ai eu de la chance et beaucoup d’opportunités. Certes, l’annonce de mon adoption m’a laissé quelques traces, mais je pense que cela a endurci mon caractère. Cependant, j’aurais pu vivre pire … Je suis tombé sur une famille aimante, que je considère comme la mienne et qui m’a toujours donné ce dont j’avais besoin. J’ai la chance de vivre ma passion à fond et je sais que ce n’est pas donné à tout le monde.