C’est aux alentours de 10h que le service d’Hae Mi commençait, vêtue de son uniforme, elle se rendit au poste d’Incheon, là où devait l’attendre une bonne charge de travail.
A croire que le vol s’était transformé en une épidémie au cours de ces derniers jours, pas une seule journée ne s’était déroulée sans qu’une plainte ne soit déclarée ou qu’un pickpocket ne soit amené au poste afin d’être entendu. Etait-ce le reflet de la société actuelle ? Une société en pleine période de crise ? Peut-être bien. De plus en plus de gens galéraient à se subvenir à eux-mêmes, pour certains cela relevait même du domaine de la survie. Par conséquent, parfois c’était le désespoir qui menait certaines de ces personnes à commettre ce délit. Toutefois, il y avait des voleurs qui ne dérobaient pas les autres pour leur propre survie. Certains d’entre eux le faisaient juste pour le plaisir de l’action et ce genre de personnes, ne méritaient aucune excuse, ni même aucune clémence. Mais ce qui était d’autant plus risible c’est qu’en général c’étaient ces voleurs en question qui imploraient la clémence de la police et non ceux qui n’avaient agi que par désespoir.

Tandis que la policière se glissa derrière son bureau et commença à consulter les différents dossiers qui y étaient étalés, l’un de ses collègues vint la trouver, il devait sûrement être question d’une nouvelle affaire. Ou alors peut-être qu’un nouvel évènement s’était déroulé au sujet d’une affaire que la jeune femme avait déjà traité. Son collègue posa quelques dossiers sur son bureau.

« C’est toi qui t’était chargée de l’affaire du vol de couches pour bébé dans un supermarché, pas vrai ? »
« Oui c’est bien moi, pourquoi ? »
« Il y a de nouveau eu un autre vol et tout porte vers ce même suspect que l’on recherche toujours. Un témoin doit être entendu, tu t’en charges ? Elle devrait bientôt arriver . »
« Très bien, je prends ça en main alors. »

La jeune femme jeta un coup d’œil rapide au dossier qui rendait compte des détails du vol, afin de pouvoir se faire une idée générale de la situation et y assimiler les propos du fameux témoin. Toutefois, elle ne s’intéressa pas pour l’instant aux informations renseignées sur les employés de l’établissement, elle n’avait pas le temps pour ça, c’est au cours de l’interrogatoire qu’elle y prêterait davantage d’attention.
C’est plusieurs dossiers concernant l’affaire sous les bras que la policière se rendit au niveau de l’accueil afin d’attendre le témoin qui devait bientôt arriver selon les dires de son collègue. Tandis qu’Hae Mi discutait avec la réceptionniste de l’accueil, une jeune fille entra et vint se présenter à la réception. Sûre qu’il s’agissait du témoin, la policière se chargea de l’accueil.

« Bonjour. En quoi puis-je vous aider ? »
«Bonjour…  j’ai appelé pour… un vol.»
«Je vois. Si vous voulez bien me suivre. »

La jeune fille semblait intimidée, tel en témoignait son bégaiement mais également son regard fuyeur. Elle était jeune, ça pouvait se comprendre, les postes de police avaient tendance à impressionner, surtout à cause de l’idée négative que l’on se faisait en général. Hae Mi l’emmena dans la salle d’interrogatoire où elle posa ses dossiers sur un bureau placé en plein milieu. Elle tira les deux chaises et invita la plus jeune à s’asseoir en face d’elle, cette dernière n’avait même pas osé bougé d’un poil et semblait terrifiée, comme si cette dernière avait fait quelque chose de mal alors qu’elle n’était qu’une simple témoin.


« Ne te laisse pas impressionnée par les lieux, tout va très bien se passer. Ce que je vais te demander n’est pas très sorcier. Je vais d’abord te demander ta version des faits et ensuite, je te poserais des questions. D’accord ? »

C’est de son ton le plus doucereux que l’agent s’était adressée à la plus jeune. Habituellement, elle ne faisait pas dans la dentelle mais pour l’occasion, la jeune femme avait pris sur elle-même et avait tâché de paraître le plus gentille possible. La jeune témoin était déjà assez effrayée, il ne fallait pas qu’en plus de cela elle se braque à cause d’Hae Mi, mieux valait la mettre en confiance afin que cette dernière puisse narrer les faits de la manière la plus précise qu’il soit car parfois, le stress pouvait nous faire omettre, les faits les plus importants ou rendre le récit imprécis.

« Je me doute bien que tu n’es pas une menteuse et je ne veux pas non plus t'effrayer, c’est plutôt pour la forme que je dois te tenir ces propos, donc n'ais pas peur. Tu me jures que tout ce que tu vas me raconter là est la vérité, pas vrai ? Ton témoignage est un acte de parole, entendable devant une cour en cas de jugement, tu comprends bien ce que cela veut dire pas vrai ? Par conséquent, il faudra que tu ne dises que la vérité, viens en juste aux faits et n’exagère rien. Compris ? »

La policière sortit son portable de sa poche et régla son dernier sur le mode dictaphone afin de pouvoir enregistrer les propos de la demoiselle qu’elle transcrirait plus tard par écrit.

« A trois, on commence, ok ? 1, 2 , 3… » Une fois le décompte fait, Hae Mi pressa le bouton enregistreur et écouta ce que la demoiselle avait à déclarer.

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Jamais Hae Mi n’avait eu encore à s’occuper d’une témoin aussi jeune, ce qui avait été assez déconcertant au début. Lorsqu’il était question d’adultes, la demoiselle pouvait se comporter comme à l’accoutumée, c’est-à-dire un peu désinvolte, voir même limite rentre dedans du à son extrême franchise. Elle n’avait pas besoin de montrer un masque de douceur qui ne lui correspondait pas vraiment, les adultes n’étaient pas aussi impressionnables. Néanmoins, la témoin actuellement assise en face d’elle n’était même pas encore majeure en plus de cela, était timide. Il fallait dont que l’agent Seo pèse ses mots, la rassure, se montre douce afin de ne pas la braquer et au final, il s’avérait que ce n’était pas si facile que cela car le naturel voulait toujours reprendre le dessus malgré les efforts réalisés. Cependant, Hae Mi avait beaucoup de force d’esprit et malgré la difficulté apparente, elle parvenait à se contrôler, de toute façon il le fallait. De plus, les efforts de la policière semblaient porter leurs fruits car la plus jeune ouvrit enfin la bouche et n’hésita pas une seconde à affirmer qu’elle dirait la pure et simple vérité sans aucun trémolo dans la voix. Estimant que la jeunette était prête, Hae Mi fit le décompte puis enclencha la touche enregistreuse de son appareil tandis que la demoiselle commença à raconter sa version des faits.

«Ehm… ce matin, vers… dans les environs de 10h30, j’ai été témoin d’un vol à l’étalage à l’animalerie où je travaille. C’est l’animalerie Uwa&Yaong. Je n’ai pas vu l’homme entrer, car je ne me trouvais pas à l’entrée. J’étais du côté ouest du magasin, là où il y a la sortie et la caisse, c’est là que je l’ai vu et entendu prendre deux sacs de nourriture pour chien. J’ai tourné la tête deux secondes pour regarder un truc quelconque sur le babillard, et j’entendais le bruit que faisaient les sacs. Je m’imaginais qu’il lisait l’endos du sac… Quand je me suis retournée, l’homme se dirigeait vers la sortie et fermait la fermeture éclair de son… quand même assez grand sac de sport noir. Sur l’étagère, deux sacs de nourriture pour chien adulte de petite taille avaient disparus. Oh ! C’est vrai, j’avais spécifié tout à l’heure au policier qui a répondu à mon appel que le sac du voleur ne me semblait pas vide…»

Les faits corroboraient avec la version déjà narrée au collègue d’Hae Mi. La demoiselle avait donc aperçu le dos du voleur. Cependant, c’était dommage car il ne semblait pas que cette dernière ait pu l’apercevoir de face, cela les auraient davantage aidé afin de pouvoir établir un portrait-robot. D’ailleurs en parlant du voleur, il faudrait que l’agent Seo essaie de retirer un peu plus de détails physiques à son sujet car la demoiselle ne s’était pas trop penchée sur sa personne. Alors que la policière s’apprêtait justement à l’interroger au sujet du voleur, la plus jeune reprit, elle n’avait pas fini et avait juste cherché à retrouver son souffle après le long récit qu’elle venait de faire.

« Après, il a quitté l’animalerie et il a suivit le trottoir de la rue commerciale vers la gauche… enfin, vers ma gauche, quand je regarde vers la rue depuis le commerce. Il ne s’est évidemment pas retourné quand je l’ai interpelé. »

C’était un récit très complet et d’ailleurs la policière en félicita la demoiselle qui avait su prendre son courage à deux mains et maîtrisait son stress. Parfois, il était nécessaire de recommencer les auditions car les témoins n’étaient pas toujours clairs ou alors à cause du stress, finissaient par s’embrouiller mais ce n’était pas le cas de la jeune fille, elle avait été forte et avait su garder son calme ce qu’Hae Mi avait admiré. Toutefois, l’heure n’était pas aux compliments, il lui fallait plus de détails sur le voleur et peut-être qu’Hae Li pourrait les lui donner.

« Je te remercie pour ce récit très ordonné et très complet. Toutefois, j’aurais aimé que tu me parles un peu plus du voleur. Tout au moins en ce qu’il s’agit de son physique. Etant donné ton emplacement au moment du crime, j’imagine que tu n’as du le voir que de dos pas vrai ? A moins que tu ais pu apercevoir un peu de son visage ? Une description physique nous serait très utile, même si tu n’as pas vu son visage. Par exemple son style, sa corpulence, sa taille etc sont des détails qui pourraient nous être favorables. Te souviens-tu de son apparence ? »

La jeunette sembla réfléchir un instant puis approuva, elle se souvenait encore du physique du voleur, tout au moins, ce qu’elle avait aperçu malgré la vitesse des évènements.
Tandis que la demoiselle décrivait maintenant l’homme, l’officier Seo entreprit de jeter un coup au dossier de la dénommée Hae Li. Elle se doutait bien que la jeune femme n’avait jamais rien fait de mal, cela se voyait tout de suite à son comportement doux et calme. De plus, sa visite au commissariat l’avait fortement impressionné mais pour la forme, il était nécessaire qu’elle le fasse.
La jeunette acheva enfin son récit tandis que l’officier Seo leva les yeux vers elle aussitôt, cette dernière affichait un air surpris par rapport à ce qu’elle avait trouvé dans le dossier de cette témoin. Le hasard savait toujours comment surprendre… Si un jour, on avait dit à Hae Mi qu’elle rencontrerait cette jeune fille de la sorte, elle aurait ri… Quelle drôle de contexte pour rencontrer cette cousine qu’elle n’avait jamais vu auparavant.

« Tu ne me connais pas et n’a peut-être jamais entendu parlé de moi mais il s’avère que toutes deux nous sommes liées… Je suis la fille de la sœur de ta mère biologique… C’est-à-dire ta cousine. »

C’était bel et bien une drôle de manière d’annoncer une nouvelle aussi importante à la demoiselle mais Hae Mi ne savait pas comment s’y prendre et la délicatesse n’était pas son fort, en plus de la surprise qui s’ajoutait au tout. Comment Hae Li allait-elle réagir face à cette surprenante révélation ?

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